3% en Flandre, 12,5% en Wallonie et à Bruxelles
A partir du 1er janvier 2022, en Flandre, les droits d’enregistrement à l’achat d’une habitation passeront de 6% à 3%. Concrètement, pour un logement, appartement ou maison, acheté 250.000 euros, il ne faudra plus payer que 7500 euros de droits d’enregistrement, soit deux fois moins qu’à présent
Notons que, dans le même temps, la Flandre prévoit d’augmenter les droits d’enregistrement lors de l’acquisition d’une résidence secondaire ou de biens destinés à être mis en location. Dans ce cas, ils passeront de 10% à 12%.
En Région wallonne, les droits d’enregistrement sont actuellement de 12,5%. Les acquéreurs d’un logement en Wallonie bénéficient d’un abattement de 20.000 euros. Cela leur permet d’économiser 2500 euros sur les droits d’enregistrement. Concrètement, l’achat d’un appartement ou d’une maison de 250.000 euros s’accompagnera du paiement de 28.750 euros de droits d’enregistrement. Pour bénéficier de l’abattement, des conditions doivent être respectées, comme ne pas être déjà propriétaire d’un autre bien immobilier et s’engager à faire du bien acheté sa résidence principale.
Il est possible, en Wallonie, de bénéficier de droits d’enregistrement de 6% dans le cas de l’achat d’une habitation « modeste », dont le revenu cadastral n’excède pas 745 euros. On passe à 5% de droits d’enregistrement si l’acquéreur contracte un prêt hypothécaire social. Là aussi, des conditions sont à respecter.
Il reste encore, en Wallonie, le « chèque habitat », une réduction d’impôt liée aux emprunts hypothécaires, mais pour laquelle des conditions sont à respecter, notamment des conditions de revenus maximums (moins de 87.043 € pour 2021): celui-ci peut aller jusque 1520 € par personne pendant 10 ans (majorés de 125 € par enfant), et de 50% de cette somme pendant les 10 années suivantes.
En Région bruxelloise, acquérir un logement nécessite de payer 12,5% de droits d’enregistrement. Cependant, les acquéreurs d’un premier logement dans la région de Bruxelles-Capitale bénéficient d’un abattement de 175.000 euros, ce qui représente une économie de 21.875 euros sur le total des droits d’enregistrement, à condition que le bien acheté soit payé moins de 500.000 euros et qu’on s’engage, notamment, à y résider cinq ans. Concrètement, à Bruxelles, acheter une maison ou un appartement de 250.000 euros nécessitera de débourser 9375 euros pour les droits d’enregistrement.
Les Bruxellois et les Wallons devraient-ils envisager d’acheter leur premier logement en Flandre ?
Une telle différence de taux pour les droits d’enregistrements, 9,5% d’écart, fera peut-être réfléchir les candidats acquéreurs, surtout ceux qui cherchent un bien dans une localité proche de la frontière linguistique, à condition qu’ils soient prêts, par exemple, à s’attaquer aux formalités administratives en néerlandais…
On peut penser à l’axe de l’autoroute E40, entre Bruxelles et Liège, dont une bonne partie flirte avec la frontière linguistique.
Jusqu’à présent, on a surtout vu des personnes originaires de Flandre venir acheter au sud de la E40, en Wallonie, pour trouver des prix de l’immobilier plus bas. Le prix moyen d’une maison en province de Liège, selon le dernier baromètre des notaires, était de 210.254 euros, contre 274.524 dans la province du Limbourg.
Cependant, dans les zones les plus proches de la frontière linguistique, l’écart entre les prix est souvent moindre. Verra-t-on, dès lors, des « Wallons » s’installer de l’autre côté, en Flandre pour bénéficier de droits d’enregistrements de 3%? « La question va se poser, surtout dans des habitations qui seraient à proximité des axes autoroutiers, puisqu’on sait que ce sont souvent des personnes qui vont travailler vers Bruxelles et ont parfois des moyens financiers qui permettent d’acheter des biens plus importants. Et donc on risque de voir certains ménages francophones aller se mettre du côté néerlandophone », estime Me Renaud Grégoire, porte-parole de la Fédération royale du Notariat belge. Car, poursuit-il, « entre 3% et 12,5%, le delta est quand même très important ».
A Bruxelles, pour Eric Verlinden, le patron du groupe immobilier Trevi, la baisse à 3% des droits d’enregistrement en Flandre va changer la donne et inciter à comparer. « Si vous êtes un acquéreur potentiel avec un budget de maximum 200.000 euros, la question est réglée, la Région bruxelloise reste attractive », explique Eric Verlinden.
Celui-ci rappelle cependant que beaucoup de maisons à Bruxelles coûtent plus, « plutôt 400.000 ou 500.000 euros ». Alors, comparer, par exemple entre Laeken en région bruxelloise et Wemmel, la commune voisine en Flandre, pourrait valoir la peine. « Si vous prenez un quartier, comme le quartier des Pagodes, à Laeken, connu comme étant de relativement bonne qualité, dans cette zone-là, les prix entre Wemmel et Laeken, dans les bons quartiers, vont être relativement similaires. Et vous allez payer 9,5% de moins (en droits d’enregistrement) », poursuit Eric Verlinden.
Plus les biens immobiliers seront chers, plus il sera intéressant de les acheter en Flandre
Le calcul sera nettement plus en faveur d’un achat immobilier en Flandre pour les biens les plus chers, ceux dont le prix sera supérieur à 500.000 euros, puisque passé ce montant, il n’y a plus d’abattement en Région bruxelloise. En Flandre, « sur 500.000 euros, vous allez payer 3%, c’est-à-dire 15.000 euros de droits d’enregistrement. D’un autre côté, en Région bruxelloise, vous allez payer 12,5% »,argumente Eric Verlinden pour qui, même pour un prix de 450.000 euros, l’achat sera plus intéressant en Flandre qu’à Bruxelles.
Autre exemple, le sud de la capitale. Uccle, en Région bruxelloise, Waterloo, en Région wallonne et Rhode-Saint-Genèse ou Linkebeek en Flandre sont des communes assez similaires. On y trouve une quantité de biens immobiliers de qualité supérieure aux prix plus élevés. Entre ces trois types de communes où les taux des droits d’enregistrement seront différents, l’avantage ira à l’investissement en Flandre. A Rhode-Saint-Genèse ou Linkebeek, « juste dans cette zone tampon entre Bruxelles et la Wallonie, vous allez payer des droits d’enregistrement qui sont quatre fois moins élevés », ajoute Eric Verlinden, le patron du groupe Trevi. « Une villa dans ces zones-là coûte assez facilement 500, 600, 700, 800.000 euros. Vous imaginez l’impact que cela peut avoir sur votre budget puisque vous allez payer 9,5% de taxes en moins. Sur 600.000 euros, on parle de quasiment 60.000 euros », calcule Eric Verlinden.
La réforme en Flandre risque donc de booster l’intérêt des candidats acquéreurs bruxellois, surtout s’ils prévoyaient d’habiter dans les communes plus éloignées du centre de Bruxelles.
Cela, c’est à condition, bien sûr, d’être prêt à vivre dans une région où la langue officielle est le néerlandais et où toutes les démarches administratives devront se faire dans cette langue.
Dans le calcul, pour comparer l’intérêt d’acheter en Flandre plutôt qu’à Bruxelles ou en Wallonie, les candidats acquéreurs s’intéresseront peut-être aussi à d’autres aspects de la fiscalité. « Il y a d’autre part la question des impôts, des centimes additionnels, des taxes d’immatriculation », souligne Me Renaud Grégoire, de la Fédération des Notaires.
On pourrait encore parler des primes liées à l’énergie qui pourraient rendre plus intéressant un achat immobilier d’un côté de la frontière linguistique plutôt que de l’autre. Même si ces aspects, intéressants à envisager pour le long terme, joueront moins au moment de l’achat du premier logement. « Quand vous achetez, c’est votre budget immédiat qui prime. C’est au moment de l’acquisition que vous avez le moment le plus pénible. L’endettement maximum, c’est à ce moment-là qu’il est »,estime Eric Verlinden de Trevi.
Selon lui, le prix d’achat du bien, les éventuels travaux et les droits d’enregistrement constituent « le package ». Le reste, comme les primes énergétiques, « ça va se diluer dans le temps » et « vous le sentez moins dans votre budget », estime l’expert du secteur immobilier.